16 octobre 2014

Van Gogh : L’exaltation créatrice se mêle à la folie

Au départ, il y a un homme, convaincu qu'il ne saurait exercer une autre activité que celle de pasteur. Comme son père et son grand-père, il travaille dur ; son objectif étant de rentrer à l'Université de théologie d'Amsterdam. En 1878, il échoue au concours d'entrée. Mais Vincent Van Gogh persiste. Sa foi l'obsède. Sans diplôme, sans titre et sans argent, il continue dans cette voie. Il n'admet pas d'y renoncer malgré les tentatives de dissuasion de son frère Théo, celui qui restera toujours son confident le plus proche et qui deviendra par ailleurs un grand collectionneur d'art.
"A quoi pourrais-je être utile, à quoi pourrais-je servir ! Il y a quelque chose au-dedans de moi, qu'est ce que c'est donc !", écrit V. Gogh avant d'être peintre. L'intransigeance de ses opinions, son exigence intérieure et sa misère physique le plongent dans la solitude. Un abîme dont il ne se sort que par l'exercice quotidien du dessin et... la folie.

Sa passion pour la peinture débute l'année de ses 27 ans et sa première toile date de 1881. Il s'agit de "Nature morte avec chou et sabot", qu'il réalise sous la conduite du peintre Mauve. Ce dernier, en découvrant l'œuvre de V. Gogh s'exclame "j'ai toujours cru que tu étais un triple couillon, mais je me rends bien compte à présent qu'il n'en est rien". Le talent s'est révélé, un peintre est né. Lorsque sa maladie se déclare, Vincent s'intéresse au réconfort que la peinture peut lui procurer. La peinture est son seul souci. Le reste lui indiffère.

"Il n'était jamais satisfait de son œuvre, toujours il rêvait au-delà de ce qu'il réalisait... Il rêvait l'impossible... Avec des colères sauvages, il s'emportait contre sa main, sa main lâche et débile, incapable d'exécuter, sur la toile, tout ce que son cerveau concevait de perfection et de génie", dit O. Mirbeau dans "Le Journal" du 17 mars 1901.

De son vivant, V. Gogh reste en marge, son œuvre ne suscite que des critiques négatives, il ne bénéficie pas de la reconnaissance du public. Ce n'est que plus tard que l'on reconnaît toute la valeur de V. Gogh, dans sa maladresse, ses tensions, ses contradictions et que l'on prend conscience du rôle important qu'il a joué dans l'histoire de l'art.

L'homme est méprisé, rejeté par la société. Peu nombreux sont ceux qui s'intéressent à sa peinture. Alors il se peint lui-même pour s'assurer qu'il existe bien. Entre 1885 et 1889, il réalise 43 autoportraits. Il se regarde, se cherche, se scrute, se dévoile et se perd. A travers ses portraits, on observe le destin tragique d'un homme, empreint de frustrations et de folie. De génie aussi. "J'ai toujours un remords et énormément quand je pense à mon travail si peu en harmonie avec ce que j'aurais désiré faire", écrit-il un jour à son frère Théo.

En 1889, pour la première fois, Van Gogh vend une toile. La seule de son vivant. Il en a peint alors plus de 700. Chaque toile est l'éclatement de son monde intérieur, le résultat d'un processus infiniment complexe. Il se dévoue à la peinture huit ans seulement, où il exprime ce qu'il regarde et ce qu'il voit. Huit ans qui feront de lui le fondateur de l'expressionnisme moderne, dans l'intensité de l'expression, une vision subjective du monde, le jeu des lumières.

"Je pense qu'il est parti à 37 ans parce qu'il était hélas arrivé au bout de sa funèbre et révoltante histoire de garrotté d'un mauvais esprit", écrit Antonin Artaud le jour où V. Gogh décide de mettre fin à ses jours, une balle dans la tête.. Ce jour de juillet 1890, il laisse derrière lui 880 peintures qui le classent aujourd'hui au rang des plus grandes figures de l'art.